Enjeux et défis de l'initiative PPTE au Cameroun

Présentation de l’ouvrage produit par le Centre de Recherches pour le Développement Durable en Afrique (CREDDA) intitulé : « ENJEUX ET DEFIS DE L’INITIATIVE PPTE au Cameroun»

Caractéristiques de l’ouvrage :

Auteur : CREDDA

Année de publication : octobre 2001

Editeur : Presses Universitaires d’Afrique (P.U.A.)

Partenaire financier : Fondation Friedrich Ebert

Nombre de pages : 210

1- Pourquoi une réflexion sur l’Initiative PPTE et Cameroun ?

L’importance d’un tel exercice se justifie à plusieurs égards :

(i) L’originalité de l’initiative

C’est un cadre d’action élaboré par la Banque Mondiale et le FMI et conçu pour fournir une assistance spéciale aux pays pauvres très endettés ( PPTE ) qui mettent en œuvre, à l’aide des financements concessionnels, des programmes d’ajustement et de réformes appuyés par ces deux institutions, mais pour qui les mécanismes d’allègement de la dette ne suffisent pas ( à savoir les programmes de stabilisation et de réformes soutenus par les organisations de Bretton Woods, les rééchelonnements des flux consentis par les créanciers du Club de Paris à des conditions concessionnelles, suivis d’opérations sur le stock de le dette, annulations des dettes bilatérales et nouveaux apports financiers assortis des conditions concessionnelles ).

(ii) Sa spécificité

Elle ne concerne que les 41 PPTE – parmi lesquels le Cameroun - dénombrés à ce jour et dont la plupart sont des pays africains. L’IPPTE vise à intensifier les liens entre l’allègement de la dette, la réduction de la pauvreté et la politique sociale.

(iii) Sa finalité

Elle vise à garantir que les pays bénéficiaires ne soient plus confrontés à une charge d’endettement intolérable. Elle s’inscrit dans le prolongement des mécanismes existants d’allègement de dette.

(iv) L’imbroglio juridique autour de ce concept

De fait, l’opinion a vite fait d’assimiler l’IPPTE à une remise de dette. Etait-ce réellement le cas ?

(v) Les attentes à l’égard de l’IPPTE

Elles nous ont paru démesurées. En effet, l’IPPTE a été perçue comme la panacée. Les discours qui ont été prononcés sur ce sujet ont présenté l’initiative comme la solution aux divers problèmes auxquels le Cameroun est confronté.

(vi) La capacité du Cameroun a atteindre les points dits de décision et d’achèvement

Le bénéfice de l’IPPTE n’est pas sans conditions. Le Cameroun peut-il, dans les délais qui lui sont impartis remplir toutes les conditions exigées ?

(vii) La capacité du Cameroun à gérer au mieux les ressources additionnelles issues de cette initiative.

Au moment où nous commencions la réflexion, le Comité Consultatif et de suivi de la gestion des ressources PPTE n’était pas encore créé. Même après sa création, nous voudrions nous interroger sur les nécessaires balises à mettre sur pied pour optimiser la gestion desdites ressources.

Ayant donc saisi l’importance d’une réflexion sur l’IPPTE et le Cameroun, nous l’avons engagé au sein du CREDDA, d’abord à travers la publication du numéro de Juin 2000 du Bulletin Social, ensuite de manière approfondie à travers la rédaction de l’ouvrage dont la présentation nous réunit aujourd’hui.

2- Comment cette étude a t-elle été réalisée ?

(i) Pour réaliser cette étude, nous avons bénéficié d’un appui substantiel de la Fondation Friedrich-Ebert. C’est le lieu de remercier le Représentant-Résident de cette institution et toute son aimable équipe pour tout l’appui qu’ils nous ont apporté.

(ii) Par ailleurs, nous avons mis à profit les enseignements de trois jours de brainstorming dans le cadre d’un séminaire d’imprégnation sur les questions de l’IPPTE modéré par le CREDDA et organisé à l’intention des membres de l’AJEC ( Association des Journalistes Economiques du Cameroun ) avec l’appui de la FFE. Les leçons et les questionnements de cette rencontre nous ont permis d’approfondir notre réflexion.

(iii) Afin de mieux apprécier les attentes ( et les craintes ) de l’IPPTE par les populations à l’égard de l’IPPTE, nous avons réalisé une enquête légère dans cinq des dix provinces que compte le Cameroun. Les résultats desdites enquêtes ont été édifiantes pour les chercheurs que nous sommes. Nous avons délibérément voulu nous inscrire dans le prolongement des consultations participatives afin d’obtenir des informations additionnelles aux dites consultations.

(iv) Pour l’analyse des scénarii de la soutenabilité de la dette du Cameroun, nous avons abondamment puisé dans les sources documentaires du FMI et de la Banque Mondiale, et surtout le document préparatoire à l’admission du Cameroun à l’IPPTE publié en mai 2000.

3- Quelle est la structure de l’ouvrage ?

L’ouvrage comprend cinq chapitres, dont un chapitre préliminaire situant la double face de l’IPPTE, à savoir la nécessité de réduire le fardeau de la dette d’une part, et le souci d’investir les économies supplémentaires dans la réduction de la pauvreté. Le chapitre 1 nous dit pourquoi l’IPPTE a t-elle vu le jour et nous informe sur son cadre conceptuel. Quant au chapitre 2, il tente de répondre à la question de savoir si l’IPPTE est réellement une remise de dette. Les liens entre l’allègement de la dette et la réduction de la pauvreté sont analysés dans le chapitre 3. Ici également, on s’essaie sur des analyses prospectives de la soutenabilité de la dette extérieure du Cameroun ; de même, les questions relatives au financement de l’IPPTE et à l’Aide Publique au Développement ( APD ) sont abordées ici. Enfin, le dernier chapitre traite des aspects de la gestion des ressources PPTE et de la gouvernance qui doivent guider les différentes actions qui seront entreprises tant au sein du Comité Consultatif, qu’en amont et en aval de celui-ci. Enfin, un résumé analytique des craintes et des attentes des populations interrogées lors de l’enquête est présenté dans ce chapitre.

4- Quelles sont les grandes conclusions de l’étude ?

Premièrement, la revue de la dette extérieure du Cameroun ainsi que l’analyse de son profil social justifient qu’il soit admis à l’IPPTE. En effet, sur la base des critères de soutenabilité de la dette énoncés par les organisations de Bretton Woods, la VAN du stock de la dette en 1998/99 était de 3.427,200 milliards de F.CFA, contre 3.413,9 milliards de F.CFA en 1999/00. le ratio objectif, c’est-à-dire le ratio VAN de la dette / exportations des biens et services - qui est le principal indicateur de viabilité de la dette – était de 214 % en 1998/99 contre 200,5 % en 1999/00 ( la norme est comprise en 200 et 250 % ). En outre, en revisitant la question de la pauvreté dans les années 90, nous nous sommes inspirés d’une étude récente pour montrer que la pauvreté était plus amplifiée qu’on ne le pensait. Dans cet ordre d’idées, c’est plus de 60 % de la population qui se situeraient en dessous du seuil de pauvreté de 533,87 F.CFA par équivalent adulte et par jour.

Deuxièmement, l’IPPTE n’est pas la panacée tant vantée. Même si la dette extérieure du Cameroun est intégralement annulée, il aura encore besoin d’une aide extérieure considérable. Il faut noter que depuis 1994/95, les transferts nets sont fortement négatifs. De même, les IDE suivent une tendance baissière depuis 1988.

Troisièmement, selon la Banque Mondiale, la somme totale de la réduction de la dette est de 1100 milliards de F.CFA. En termes de VAN, le pourcentage de réduction est d’un tiers de la dette totale, contre par exemple 6 % pour la Côte d’Ivoire qui a bénéficié du cadre initial de l’IPPTE.

Quatrièmement, la parenté entre l’IPPTE et la remise de la dette n’est pas si lointaine que l’on pourrait le penser. Sans être une véritable remise de dette au sens classique, l’IPPTE y puise ses racines. La singularité de l’IPPTE par rapport au concept juridique de remise de dette est liée tantôt aux objectifs, tantôt aux conditions de l’IPPTE.

Cinquièmement, en fin juin 1999, l’essentiel de la dette nominale était détenu par les créanciers bilatéraux à concurrence de 70 %, et 26 % pour les multilatéraux. La France occupe le premier rang des créanciers avec 37 % de la dette totale en termes de VAN.

Les données du FMI prouvent que la dette du Cameroun restera insoutenable jusqu’en 2007 puisque le ratio objectif demeurera supérieur à 150 % ( voir page 106 ).

Sixièmement, les possibilités d’amélioration de la productivité des dépenses additionnelles sont nombreuses. Parmi elles, (i) opérer une restructuration intrasectorielle et intersectorielle, (ii), mieux cibler les dépenses sur les pauvres, (iii) adopter les principes de bonne gestion publique, (iv) achever la procédure de passation des marchés publics, (v) gérer les ressources PPTE suivant un processus souple, différent des procédures classiques d’exécution des dépenses publiques, (vi) offrir la possibilité aux organisations de la société civile de proposer des projets dans les secteurs éligibles à soumettre au financement PPTE, etc.

C’est en respectant ces critères et bien d’autres prévus à cet effet que les attentes des populations concernant le relèvement de leurs conditions de vie seront satisfaites, et que leurs appréhensions – relatives à la prévarication et au laxisme des gestionnaires – seront affaiblies.

5- Quelles sont les perspectives ?

L’ouvrage que nous vous présentons aujourd’hui donne une esquisse du cadre normatif de l’IPPTE telle qu’elle sera déployée au Cameroun. Par la suite, nous nous proposons d’apprécier l’effectivité de la mise en œuvre des mesures préconisées dans le cadre de cette initiative, tant en ce qui concerne le respect des promesses faites par le Cameroun que la réalisation des projets et programmes sociaux retenus ainsi que le fonctionnement du Comité Consultatif.

6- Qui sont les auteurs de l’ouvrage ?

L’ouvrage a été rédigé par quatre chercheurs du Centre de Recherches pour le Développement Durable en Afrique ( CREDDA ) - qui est une association non gouvernementale à caractère scientifique basée à Yaoundé- , tous enseignants des universités d’Etat du Cameroun : Dr MEBU Jeanne Claire, juriste, enseigne à la FSJP de l’Université de Yaoundé II ; Dr NGWEN NGANGUE, économiste, enseignant à la FSEG de l’Université de Yaoundé II ; Dr NEMBOT-NDEFFO Luc, économiste, enseignant à la FSEG de l’Université de Dschang, sous la direction de Dr TAMBA Isaac, économiste, enseignant à la FSEG de l’Université de Yaoundé.